Les utopistes, dont on se moque,
n’entretiennent-ils pas l’espérance finalement ?

 

L’utopiste, celui qui fait bien rire avec son idéalisme insensé, désire en effet un monde absolument parfait où «tout le monde il serait beau, tout le monde il serait gentil». Les utopistes se font généralement passer pour de doux rêveurs, une sorte de «doux dingues» qui n’ont pas les pieds sur terre. J’avoue aujourd’hui que j’en fais sans doute partie et tant pis si on me prouve que jamais, ô grand jamais, le monde ne connaîtra véritablement la paix et la justice. Rassurez-vous tout de même, n’étant pas tout à fait inconscient, je me rends bien compte, hélas, que je ne changerai pas ce triste monde à moi tout seul. Certains Chefs d’Etat ou hauts dignitaires, animés de bonne volonté, «il en existe tout de même !...», ne peuvent déjà pas grand chose bien souvent face aux diverses inégalités savamment entretenues par des profiteurs sans scrupule, alors évidemment, dans ce cas, me direz-vous !!...

Cependant, je me dis que rien, absolument rien, ne peut rester figer éternellement sur cette bonne vieille terre qui en a déjà tant vu et qui en verra encore de bien belles... à cause de cet étrange «animal» qu’est l’homme, doué soi-disant d’une intelligence assez "remarquable". Les historiens vous diront à quel point, à travers les civilisations, l’histoire humaine est riche de ces bouleversements dramatiques ou au contraire bénéfiques qui ont jalonné les diverses époques traversées depuis les temps les plus anciens. Aujourd’hui, notre société connaît des progrès gigantesques et le siècle, qui vient de s'achever, restera sans doute comme ayant été un des plus fantastiques sur le plan scientifique, mais aussi sur le plan des droits de la personne humaine, enfin reconnus et écrits sous la forme d’une Charte Universelle.

Bien sûr, me direz-vous encore, ces droits fondamentaux sont encore bien loin d’être appliqués si l’on constate les diverses "saloperies"commises un peu partout sur la planète. Mais ils ont le mérite d’exister et des hommes et des femmes se battent journellement pour qu’enfin ils soient reconnus et respectés. Vous pouvez les traiter d’utopistes ces milliers de «Dom Quichotte» qui payent de leur vie bien souvent pour qu’une simple idée de justice puisse enfin passer auprès du plus grand nombre. Pensons ici à Martin Luther King et à son combat contre le racisme, à Gandhi et à sa foi dans le pacifisme, à Mère Térésa avec sa lutte incessante contre l’extrême pauvreté, à l’abbé Pierre qui, à plus de 80 ans, lutte encore contre l’exclusion, à ce regretté artiste Coluche, qui a montré aux hommes politiques qu’une simple idée de génie pouvait redonner de l’espoir à tant de gens, à Nelson Mandela avec son entêtement à supprimer l’apartheid en Afrique du Sud, etc, etc... Ils ont soulevé des montagnes parce qu'ils y ont cru, tout simplement.

Autant de gens connus, ou au contraire anonymes, qui se sont levés ou se lèvent encore aujourd’hui afin que les multiples souffrances que connaît ce monde finissent par disparaître petit à petit ! Oui, il faut vraiment être un fou d’utopiste pour se donner ainsi aux autres alors qu’il y a tant d'injustices et de violences à combattre.
Toutes et tous, souvent des bénévoles travaillant dans l’anonymat au sein de multiples associations nationales ou internationales, ils ont l’ESPERANCE chevillée au corps et au coeur. Ils luttent à leur manière contre un fatalisme déprimant qui consiste à dire que rien ne peut changer vraiment dans ce bas monde, contre une coupable résignation qui consiste finalement à ne rien faire tout en ne pensant qu’à sauvegarder ses propres intérêts afin de profiter égoïstement de la vie.

Au lieu de semer des valeurs essentielles autour d’eux, au lieu d’agir, ne serait-ce qu’un peu, afin que l’autre puisse vivre un peu plus décemment, certains osent propager l’individualisme, le repli sur soi, l’indifférence, le profit, la jouissance insouciante des biens de ce monde. On les appellera peut-être des «réalistes» et ils ont peut-être raison finalement de profiter des bonnes occasions qui se présentent à eux. Après tout, nous n’avons qu’une vie, disent-ils, sans d'ailleurs que cette affirmation soit vraiment prouvée. Mon souhait pour l’avenir, c’est que nos enfants, nos adolescents et toutes les futures générations qui suivront, soient ainimés d’une extraordinaire soif de liberté et de justice et le rêve, si inaccessible aujourd'hui, pourra enfin devenir réalité, c'est CERTAIN !

Pour être heureux, il faut comprendre que la vie n’a de sens qu'à la seule condition d'agir concrètement afin que chaque être humain puisse avoir les mêmes chances. Et même s’il faudra encore des siècles pour qu’une telle utopie se réalise vraiment, cela vaut le coup d’essayer dès aujourd’hui. De toute manière, nous n’avons pas le choix, car autrement, à la fin des temps, le genre humain pourra se «vanter» d’avoir finalement tout raté. Si être utopiste c’est croire qu’un jour il n’y aura plus de guerre, que des enfants ne souffriront plus de la misère, de la maltraitance et ne dormiront plus dans les rues, que des peuples connaîtront enfin la démocratie et la justice, alors oui, je veux bien être traité d’utopiste. Je m'en moque même car çà me va très bien, merci ! L’utopie, pour moi, consiste à penser que la réalité de demain sera plus belle que celle d’aujourd’hui; cela s’appelle aussi, je crois, l’ESPERANCE, n'est-ce-pas !

Guy GILLET

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