La désobéissance civile comme dernier recours !

 

Quel titre racoleur, encore une fois, qui me fera à nouveau passer pour un provocateur incorrigible ! Pourtant, en observant à nouveau l'actualité du moment, je me dis que ce sujet, ô combien délicat, vaut bien une explication de texte, un développement particulier de la part d'un simple citoyen qui se demande quelle attitude adopter devant certaines injustices hélas "légales". Reprenons les faits : un ministre "bienveillant", très obsédé par la mise en place d'une politique répressive à outrance, nous a pondu une loi visant à reconduire à la frontière des familles étrangères vivant en France depuis des années et ceci malgré la scolarisation de leurs enfants dans nos écoles de la République.

Par cette politique, on ne désire plus tenir compte du réel désir d'intégration de ces familles par le travail pour ce qui est des parents et de cette volonté d'apprendre, de se former pour leurs enfants. Le couperet doit tomber, sans état d'âme, sans esprit humaniste. Le ministre en question, très ambitieux car candidat à la Présidentielle, mais aussi démagogique, veut séduire un électorat réactionnaire demandant le retour massif des étrangers dans leurs pays. Notons au passage que ce cher ministre, lui-même d'origine étrangère, a sans doute oublié que la France a légitimement accueilli sa famille voilà des lustres. Mais pour lui, il doit y avoir sans doute prescription dans son esprit puisque tant d'années se sont écoulées depuis l'arrivée de sa famille dans notre pays, n'est-ce-pas !!...

Mais voilà, des personnes se sont levées en France pour soutenir ces étrangers que l'on veut expulser sans aucun ménagement et ainsi des comités de vigilance ont vu le jour un peu partout. Ceux-ci ont lancé des pétitions pour alerter l'opinion contre cette loi scélérate et non démocratique. Ils vont plus loin encore en annonçant leur volonté de cacher ces familles que l'on veut éjecter du territoire. Ces gens sont simplement des parents dont les enfants fréquentent leurs petits copains étrangers à l'école et ils ne supportent pas le fait qu'on veuille les expulser du jour au lendemain. Le cher ministre sait d'ailleurs, sans vouloir l'avouer au grand jour, que si la plupart de ces familles sont venues en France, c'est pour échapper à la misère, à la guerre, à la famine, à l'oppression ou tout simplement à la mort.

On voit donc que des citoyens, responsables, humains, révoltés aussi, sont prêts à aller jusqu'à la désobéissance civile en cachant des familles pour faire opposition à la loi en question. Peut-on les blâmer, les poursuivre en justice, les condamner pour cette désobéissance ? Certains esprits, soucieux de l'ordre et des lois en vigueur, diront qu'on ne peut pas impunément bafouer les lois au nom de l'intérêt supérieur du pays qui doit passer avant tout autre considération humaniste ou humanitaire. Pourtant ces citoyens, qui se lèvent aujourd'hui contre ce qu'ils considèrent comme une grave injustice, font simplement parler leur conscience et surtout leur coeur d'êtres humains en dénonçant une injustice qui ne fait pas honneur à la France, pays d'accueil depuis des lustres.

Et puis, faisons un parallèle saisissant avec ce qui s'est passé pendant la 2ème guerre mondiale même si le contexte est fort heureusement différent. Des gens, à cette époque, se sont aussi levés contre les lois de Vichy en cachant notamment des Juifs chez eux au risque de se faire prendre et d'aller au poteau d'exécution ou dans les camps nazis. Ces français, qu'on vient encore de féliciter récemment en érigeant un monument où sont inscrits leurs noms, on les appelle, je crois, les Justes devant l'humanité. A cette époque, ces français ont fait de la désobéissance civile au risque d'y perdre leur vie en allant contre des lois promulguées par l'Etat français, lesquelles faisaient le jeu des allemands.

Aujourd'hui, en expulsant des étrangers, nous savons pertinemment que nous allons les mettre à nouveau dans une situation très délicate s'ils retournent ainsi dans leur pays avec tous les risques citées ci-dessus qu'ils devront à nouveau affronter. En obéissant à notre cher ministre, nous allons mettre des êtres humains en danger. Alors justement, est-il juste devant l'humanité de se plier à une loi qui va à l'encontre de la Charte universelle des droits de l'homme et de l'enfant dont la France est en grande partie pionnière dans ce domaine ? Ces gens aujourd'hui, qui ont monté ces comités de vigilance pour défendre les étrangers, ne sont-ils pas aussi à leur manière des Justes ?

Pour finir, citoyens, il n'est pas question ici de prôner le non-respect des lois indispensables pour vivre en société et en bonne harmonie, surtout lorsque celles-ci sont dictées dans un esprit d'ouverture démocratique veillant à la liberté, à l'égalité et à la fraternité. Cependant, si l'on considère qu'une loi est discriminatoire, inhumaine et va à l'encontre de l'intérêt supérieur de la personne humaine, on se doit de faire un choix moral qui engage notre responsabilité d'être humain soucieux du respect scrupuleux de la dignité et de l'intégrité de tout homme, toute femme ou tout enfant vivant sur cette planète. Au-delà de toute loi finalement, chacun peut tout d'abord se demander personnellement s'il a le droit de désobéir à sa conscience, à son coeur, au risque de se renier.

Guy GILLET

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